Pour l’agriculture écologiquement intensive (AEI), l’intensivité s’applique aux fonctionnalités écologiques, par leur amplification et la pleine intégration des écosystèmes. Il s’agit dès lors, non seulement, de tirer le meilleur parti possible des ressources naturelles, en s’assurant de leur pérennité, mais aussi de plus jouer sur la main d’œuvre que sur le capital. Une option qui fait sens dans la crise que traversent nos sociétés à fort taux de chômage. Mieux, l’agriculture écologiquement intensive pourrait, selon Michel Griffon[1], réconcilier producteurs et consommateurs, qui ont, aussi bien les uns que les autres, tout à gagner à envisager les conséquences globales de leurs pratiques, et non uniquement leurs intérêts individuels, tout en tenant compte d’enjeux fondamentaux tels que la faim dans le monde. Dans cette optique, l’auteur de « Qu’est-ce que l’agriculture écologiquement intensive ? » n’exclue pas a priori les OGM, ni les biocarburants. L’essentiel consiste alors pour lui à toujours appréhender les systèmes dans leur globalité et leur complexité, sans chercher à imposer une solution universelle.
Dans son approche, l’économiste et agronome insiste sur la nécessité d’une intervention publique dans le domaine de l’écologie – définie comme le contrôle des milieux et des écosystèmes – car structurellement, ce type de secteur « où l’innovation n’est pas un objet de propriété intellectuelle » ne peut intéresser les firmes privées. De même, il faudrait une politique qui prenne en compte tous les aspects non alimentaires de l’agriculture, avec des « mécanismes équitables de répartition des charges et des bénéfices », en finançant et encourageant par exemple des « services environnementaux » rendus par les agriculteurs.
En résumé l’agriculture écologiquement intensive[2] désigne une agriculture, non plus intensive en produits chimiques, mais qui utilise au mieux le fonctionnement des écosystèmes sans altérer leur renouvellement. D’une certaine manière, c’est une agriculture qui fait confiance aux capacités productives naturelles du vivant. Il s’agit bel et bien d’une nouvelle orientation technique pour les agricultures, celle de l’utilisation de l’écologie scientifique comme base des raisonnements des modèles de cultures et d’élevages.
L’AEI s’illustre notamment via La Nouvelle agriculture[3]. Cette marque a été créée en avril 2017 par les agriculteurs adhérents à la coopérative Terrena. Elle propose quatre types de viandes : lapin, porc, poulet et bœuf commercialisés dans les grandes et moyennes surfaces de l’Hexagone.
Ces produits répondent à un cahier des charges basé sur une agriculture innovante, respectueuse du vivant et sur des agriculteurs capables d’élaborer des produits de qualité accessibles à tous pour une alimentation plus saine[4]. L’objectif de ces agriculteurs et de leur coopérative est de retisser un lien fort et direct avec les consommateurs.
Onze engagements rassemblent ces agriculteurs : éviter l’usage des antibiotiques, nourrir les animaux sans OGM, assurer une traçabilité du champ à l’assiette, respecter un cahier des charges pour le bien-être animal, introduire des aliments riches en oméga 3 grâce au partenariat avec Bleu Blanc Cœur, limiter les intrants chimiques, maîtriser les filières, préserver et développer la biodiversité, réduire les émissions de CO2, faire contrôler les élevages par un organisme indépendant, et enfin innover pour produire toujours mieux.
La démarche bénéficie de recherche et développement initiés en interne dans la dynamique d’agriculture écologiquement intensive et validée par des agriculteurs expérimentateurs « Sentinelles de la terre ». Les productions labellisées NA sont mieux rémunérés et bénéficient d’une communication efficace avec, entre autres, un affichage clair dans les rayonnages des grandes surfaces.
Source :« Manager une entreprise agricole durable » Editions France Agricole, février 2019
Livre
accessible sur le site de la France Agricole, suivez ce lien.
[1] http://www.agrobiosciences.org/agriculture-monde-rural-et-societe/Nos-selections/Lu-vu-entendu,65/article/qu-est-ce-que-l-agriculture-ecologiquement-intensive-note-de-lecture#.WWYgbYjyi00
[2] « Qu’est-ce que l’agriculture écologiquement intensive ? » Michel Griffon, Editions Quae, 2013, 224 p
[3] http://www.web-agri.fr/actualite-agricole/economie-social/article/la-marque-des-agriculteurs-de-l-ouest-engages-a-produire-mieux-1142-132267.html
[4] https://www.lanouvelleagriculture.coop/content/pour-la-vie-pour-lavenir